Si Jasmine pénétrait dans le jardin secret,
Elle pourrait sûrement goûter à tous ces fruits
Qui lui paraissaient tellement délicieux ;
Elle ne savait pas que ce très étrange jardin,
Certains l'appelaient aussi le Jardin du Mal ;
Sa mère l'en avait pourtant bien informée,
Mais Jasmine, entêtée, n'écoutait guère sa mère ;
Celle-ci lui disait parfois : « Sans penser à mal,
Tu fais parfois, ma fille, de bien laides choses. »
C'était aussi ce que lui disait l'abbé Pitre
Quand elle se rendait le samedi soir à confesse
Et que sans aucune honte elle lui énumérait
La trop longue liste de ses petits péchés ;
Elle pensait beaucoup trop à se distraire,
À papillonner de fleur en fleur, la frivole,
À s'exercer à tous les plaisirs interdits,
Elle en négligeait hélas tous ses devoirs
De bonne chrétienne ; mais l'était-elle seulement ?
Lorsque son amie Laure, du plus loin du chemin,
L'apercevait, en s'écriant: « Oh ma Jasmine,
Tu es tellement belle, tu es belle comme un coeur ! »
Elle lui sautait au cou, si coquine et mutine,
L'embrassant sur les lèvres, passionnément ;
Laure se laissait faire, ravie et presque conquise,
Et à son tour elle l'embrassait bien tendrement ;
Jasmine se disait que ces doux baisers étaient
Les plus affectueux qu'elle eut jamais reçus ;
Il lui arrivait même de penser sans en rougir :
« Quel dommage que Laure ne soit pas un garçon ! »
L'idée lui venait même qu'elle pourrait lui proposer
De jouer avec elle à l'amoureuse, juste pour savoir...